JEUX MONDIAUX DE LA VOILE
De l’or ISAF pour Ingrid Petitjean et Nadège Douroux
Six médailles pour les Français(es) sur le Lac de Neusiedl en Autriche
samedi 20 mai 2006 –
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"Il faudra que nous nous entraînions davantage dans des formats Medal race !". La formule est de Sophie de Turckheim à l’issue d’une manche finale où, malgré tous ses efforts, elle n’a pu se débarrasser du marquage de l’américaine Page Railey. Ce n’est pas la première fois que ces deux jeunes femmes qui dominent le Laser radial depuis le début de l’olympiade se livrent à un exercice de ce style avec à chaque fois le même résultat. Conséquences : malgré son nouveau titre de vice-championne du monde, l’Antiboise ne cherchait pas à cacher sa déception à l’arrivée. Les heures passant, cette battante savourera sans nul doute ce résultat qui étoffe un palmarès que bien d’autres lui envieraient mais son commentaire à l’arrivée résumait bien l’état d’esprit des français aujourd’hui. Car, syndrome de la bouteille à demi pleine ou à demi vide, on peut à la fois dire que le résultat global des français est bon - 1 titre de champion du monde, 4 de vice-champions et une médaille de bronze ! - mais que le bilan des medal races est décevant. Car si au final trois équipages ont atteint le but qu’ils s’étaient assignés ce matin - la victoire pour Ingrid Petitjean et Nadège Douroux en 470 femmes, le titre de vice-champions du monde pour les frères Bonnaud en 470 hommes et Thomas Lebreton en Laser - d’autres ont souffert. C’est moins le cas de Sophie de Turckheim qui a conservé sa place que de Julien Bontemps en RSX Hommes, Xavier Revil et Christophe Espagnon en Hobie Tiger et Marie Duvignac et Pauline Thevenot en Hobie 16. En terminant 9e de la finale, le nantais perd sa première place et rétrograde à la 3e au général. Il aura au moins la satisfaction de monter sur le podium après un championnat au cours duquel il aura prouvé son adaptation à la nouvelle planche et "retrouvé de la vitesse Vitesse #speedsailing dans le petit temps et au planning".
Dans l’ensemble ce championnat aura été tout aussi réussi pour Xavier Revil et Christophe Espagnon (ils étaient sur le podium hier soir) mais la variation du vent en force et en direction subie au cours de leur manche leur aura été fatale puisqu’ils terminent finalement 5e. A l’inverse, Yann Guichard et Laurent Guillemette, 8e hier soir, auront profité de la Medal race pour remonter à la 4e place. Ce chassé croisé entre les deux équipages tricolores symbolise assez bien l’exercice de la Medal race. Disputé sur un parcours et dans un délai réduit afin de respecter les horaires annoncés (la TV autrichienne retransmettait les régates en direct), ces régates offrent des conditions de course certainement moins régulières qu’une manche normale. "Nous devons intégrer cette nouvelle dimension car sans doute que dans d’autres conditions, le comité de course aurait retardé le départ pour attendre que le vent, qui était en train de changer, ne se stabilise. Mais bon il faudra faire avec dans l’avenir" expliquait à l’arrivé un Xavier Revil philosophe.
- Julien Bontemps, Marie Duvignac & Pauline Thévenot et Sophie de Turckheim
- Photos Guilain Grenier / www.martin-raget.com
Deuxième caractéristique, sans doute la plus importante : les médaillés potentiels délaissent le résultat de la manche pour entamer un marquage féroce ce qui peut faire le bonheur d’outsiders revenus de loin. On n’a retrouvé ainsi aucun des spis de couleur (qui identifient les trois premiers) aux premières places des manches courues aujourd’hui. C’est sans doute en Hobie 16 que ce marquage aura fait le plus de dégâts et malheureusement surtout au détriment de Marie Duvignac et Pauline Thévenot. Mais les deux toulonnaises n’auraient sans doute pas perdu le titre sans la malchance puisqu’à l’exception des Allemandes, 4e au départ de la manche et championnes du monde au final, toutes les autres concurrentes sont arrivées hors temps ! Rageant surtout que les françaises ont coupé la ligne en 3e position, 7 petites secondes après que le délai de 5 minutes accordé par le règlement pour terminer après la 1re de la manche ! Et comme si cela ne suffisait pas, les vainqueurs ont, elles, bénéficié d’une bonne étoile. Pauline Thévenot raconte : "au départ nous avions trois équipages à surveiller. Les 3e font OCS et les 4e, les allemandes donc, passent la ligne très en retard. On se dit qu’ils ne nous restaient plus qu’à contrôler les 2e ce que nous avons fait sans nous soucier des Allemandes. Seulement celles-ci étaient parties seules à droite loin derrière, le vent très léger (4 noeuds dans les risées) a tourné et elles se sont retrouvées devant et n’ont pas arrêté de creuser". Dur à digérer même si pour Marie il s’agit d’un 2e podium après son titre de championne du monde accroché aux Jeux Mondiaux ISAF de Marseille en 2002.
Mais il est aussi des français qui ont su justement profiter de la liberté de marquage accordée aux outsiders : Vincent le Boucher et Pierre Garos ont joliment complété le titre de vice-champions du monde des frères Bonnaud en 470 en gagnant la manche ce qui leur offre la 5e place au Général, Sarah Steyeart et Félix Pruvot en Laser ont eux bataillé jusqu’au bout pour décrocher la 2e place de la finale. On imagine leur sourire à l’arrivée dans cette nouvelle formule de régates qui devra sans doute évoluer mais qui, en l’état, offre de l’émotion, du suspens et un spectacle dont manifestement les nombreux spectateurs et supporters massés sur les rives du lac se sont régalés.
Si cette dernière journée a finalement permis aux australiens de se détacher et de remporter la Coupe des Nations avec trois médailles d’or et une d’argent contre une d’or et trois d’argent pour les tricolores (ce Trophée est basé sur les quatre meilleurs résultats de chaque pays), le résultat global des français, on l’a dit reste excellent pour la voile légère française avec un total de six médailles (à Marseille, aux Jeux Mondiaux de 2002, où les français jouaient à domicile, sur les 9 médailles obtenus, 2 l’avaient été en habitable).
Interviews des membres de l’équipe de France
Benjamin et Romain Bonanud : "C’est bien nous conservons notre titre de vice-champions du monde ISAF. Mais en réalité c’est mieux car nous y avons fait preuve d’une toute autre expérience et cela a été une belle régate indécise jusqu’au bout. Ces Medal races constitiuent une bonne formule avec du monde sur les rives. On a presque l’impression de régater dans une arêne et devant des tribunes. C’était l’un de nos objectifs de la saison même si cela n’a pas tout à fait la même saveur qu’un championnat du monde de classe. Nous commençons à engranger des podiums régulièrement mais il ne faut pas se griser et penser que c’est arrivé à deux ans des JO"
Félix Pruvot : "Je suis parti ce matin avec l’envie de gagner et cela s’est joué à rien. Dans ce championnat j’ai alterné des bons trucs et des moins bons avec trop de manches dans les quinze. Hier j’ai loupé le côche avec trois mauvaises manches. La progression de Thomas permet une bonne émulation car nous avons chacun nos conditions préférées. C’est bien que le Laser français en soit là. Il y a 4 ans à Marseille, j’avais terminé 20e et au championnat du monde 2005 de classe 13e. Cela progresse..."
Thomas Le Breton : "Je fais un nouveau podium un an après les Jeux Mondiaux mais celui là à une toute autre saveur car sportivement je trouve qu’il n’y a rien de mieux qu’un Mondial où tous les meilleurs sont là alors que ce n’est pas le cas aux JO par exemple (un représentant par nation, ndr). Depuis six mois je prend le départ en me disant que je peux gagner. Techniquement et tactiquement je sais que je n’ai rien à envier aux meilleurs, c’est dans la tête que cela se passe... Et avec le travail que nous effectuons c’est normal que cela paye un jour. Maintenant que j’approche du sommet et qu’il ne me reste que peu de rangs à gagner j’ai encore gagné en volonté. C’est bien car il y a quelques temps j’hésitais à passer en Finn et là je ne me pose plus de questions. Il faut juste que je gagne encore en polyvalence".
Ingrid Petitjean et Nadège Douroux : "C’est un bon résultat pour le match France-Australie (elles ignoraient alors bien sûr le résultat final). C’était notre premier objectif de performance de la saison et il est atteint. C’est un titre mondial particulier mais intéressant car comme nous ne naviguons pas sur nos bateaux tout le monde est à armes complètement égales. La particularité des Medals Race c’est de savoir s’adapter rapidement".
Yann Guichard : "Nous avons bien fait de venir ici. Tout d’abord parce que j’ai besoin de naviguer et que les meilleurs tornadistes étaient là. Ensuite parce que cela s’est bien passé avec Laurent (Guillemette). Dommage que nous ayons eu une journée sans jeudi car sinon je pense que nous pouvions accrocher le podium. Le format clef en main avec bateau identique fourni par l’organisation Organisation #organisation c’est pas mal non plus".
Xavier Revil : "C’est sûr que de perdre le podium sur une manche où le vent bascule à 45° dès le départ c’est dur. Nous sommes partis avec peu de vent et c’est monté régulièrement au cours des trente minutes du parcours. C’est la voile spectacle mais il faut s’y adapter. Au final notre 5e place est plutôt bien, vu que nous n’avions jamais navigué sur ce support. Cette Medal Race c’était un peu la roulette russe mais nous n’avons peut-être pas non plus pris un très bon départ. Notre prochain objectif : les championnats d’Europe fin juillet".
Sophie de Turckheim : "Comme depuis le début de la saison dans les Medals Race , l’américaine ne m’a pas lâché une seconde. Il va falloir travailler ce format encore plus à l’entraînement. Je suis déçue mais si je regarde l’ensemble du championnat j’ai de quoi être satisfaite après une difficile entame"
Julien Bontemps : "J’ai mal régaté dans cette dernière manche sans trop savoir si je devais faire ma course ou bien les suivre... Je n’ai pas régaté comme je l’ai fait toute la semaine. Ce n’était pas lié au stress. Il y a eu certes des rotations mais j’ai aussi commis des erreurs. Si j’enlève cette fausse note, ce championnat m’a montré que j’étais dans le coup, que j’avais retrouvé la vitesse Vitesse #speedsailing dans le petit temps et au planning".
Pauline Thévenot : "C’est vraiment dur à digérer. Au début nous avions trois adversaires à marquer. Avant le départ l’une est OCS et les Allemandes, alors 4e, sont encore sous spi en train de descendre vers la ligne quand nous nous sommes déjà parties. On se dit que vu l’avance nous n’avons plus qu’un adversaire à surveiller. Seulement les Allemandes partent seules à droite et le vent change tellement qu’elles se retrouvent seules en tête et dès lors creusent leur avance alors qu’avec toutes les autres nous régatons dans 4 noeuds de vent. A ce moment là nous ne sommes pas encore inquietes car même 3e de la manche et elles premières nous avons de l’avance au classement. Seulement nous coupons la ligne 5 minutes et 7 secondes après elles. 7 secondes de trop pour être dans les délais ! On se consolent avec le titre de vice-championnes du monde mais nous n’avons pas eu de chances".
LES PODIUMS ET LES FRANCAIS DU TOP TEN
Laser Hommes
1 AUS Tom Slingsby 33
2 FRA Thomas Le Breton 47
3 ARG Diego Romero 65
9 FRA Felix Pruvot
Laser Femmes
1 USA Paige Railey 48
2 FRA Sophie de Turckheim 55
3 AUS Sarah Blanck 62
6 FRA Sarah Steyaert 71
470 hommes
1 AUS Nathan Wilmot Malcolm Page 56,6
2 FRA Benjamin Bonnaud Romain Bonnaud 69
3 ESP Francisco Sanchez Alejandro Ramos 75
5 FRA Vincent Garos Pierre Leboucher 81
470 Femmes
1 FRA Ingrid Petitjean Nadege Douroux 26
2 AUS Elise Rechichi Tessa Parkinson 40
3 UKR Ruslana Taran Olena Pakholchyk 53
RSX Hommes
1 UKR Maksym Oberemko 29
2 NZL Tom Ashley 35
3 FRA Julien Bontemps 35
6 FRA Huguet Nicolas 61
7 FRA Samuel Launay 62
RSX Femmes
1 CHN Qiu Bin Chen 32
2 UKR Olga Maslivets 33
3 ESP Manchon Blanca 54
4 ISR Lee Korzits 57
5 FRA Charline Picon 58
Hobie Tiger
1 AUS Darren Bundock Glenn Ashby 26
2 NED Mitch Booth Herbert Dercksen 38
3 NED Coen de Koning Mischa Heemskerk 47
4 FRA Yann Guichard Laurent Guillemette 57
5 FRA Revil Xavier Christophe Espagnon 57
Hobie 16
1 GER Kerstin Wichardt Anja Hafke 48
2 FRA Marie Duvignac Pauline Thevenot 56
3 USA Annie Nelson Susan Korzeniewski 60
49er
1 ESP Iker Martinez de Lizarduy Xabier Fernandez 21
2 UKR Rodion Luka Georgiy Leonchuk 45
3 ITA Pietro Sibello Gianfranco Sibello 57
9 FRA Emmanuel Dyen Yann Rocherieux 93
10 FRA Alaxandre Monteau Damien Guillou 97
Team Racing
1er USA
2e Grande-Bretagne
9e France
La place des français du rond or
Laser Radial
Sophie de Turckheim (YC Antibes - Equipe de France Militaire) 2e (=)
Sarah Steyaert (CV Chatelallion) 6e (=)
Solenne Brain (SR Brest) 13e
Laser
Thomas Lebreton (SR Brest - Equipe de France Militaire : 2e (=)
Félix Pruvot (CN Fouesnant Cap Coz - Equipe de France militaire) : 9e (+1)
Jean Baptiste Bernaz (COYC Hyères) : 29e
470 Masculin
Benjamin et Romain Bonnaud (SN Sablais / SN Sablais) 2e (=)
Vincent Garos et Pierre Leboucher (SNO Nantes / ASPTT Nantes ) 5e (+4)
Ronan Dréano et Ronan Floch (YC Carnac / USAM Brest) 28e
470 Féminin
Ingrid Petitjean / Nadège Douroux (SN Marseille / SN Marseille) 1re (=)
Hobie Tiger
Yann Guichard / Laurent Guillemette (SRR / CN Pays Drouais) 4e (+4)
Xavier Revil / Christophe Espagnon (SRV Annecy / SRR - Equipe de France militaire) 5e (-2)
Moana Vairaux / Romain Petit (SR Brest / YC Carnac) 13e
Hobie 16
Marie Duvignac / Pauline Thevenot (YC Toulon / YC Toulon) 2e (-1)
RS :X Hommes
Julien Bontemps (ASPTT Nantes) 3e (-2)
Nicolas Huguet (La Pelle Marseille) 6e (-1)
Samuel Launay (A. Calédonienne PAV) 7e (-2)
RS :X Femmes
Charline Picon (CN la Tremblade) 5e (=)
Pauline Perrin (CV Mayenne) 11e
49er
Emmanuel Dyen / Yann Rocherieux (CNV Aix Les Bains / CN de Sciez) 9e (=)
Alexandre Monteau / Damien Guillou (CN Lorient / CN Lorient) 10e (=)
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